Une histoire collective de “La revanche du clown”

[Quand l’école déchire]

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Editions Thierry Magnier

L’album est inséré dans une malle aux livres sur le cirque. Il est emballé, sans aucun indice accessible. Pendant la première semaine de lecture et activités autour de la malle, l’album attend… Les enfants aussi, qui s’impatientent :“On l’ouvre quand ? Pourquoi on n’a pas le droit de le voir ?…etc, etc…”
Je vais d’abord leur montrer un extrait de la première de couverture, le clown, et les laisser échanger sur ce personnage, son attitude, son expression. (J’ai fait un agrandissement, consciente que cela déformait la lecture de l’image).
Puis l’album est ouvert chaque jour, matin et après-midi pour une lecture collective. Je laisse les enfants raconter ce qu’ils voient, devinent, pensent… J’attends 24h pour ouvrir la dernière page.
Puis je propose aux enfants d’écrire collectivement l’histoire de ce clown. 
Voici le texte final. Il a donné lieu a bien des négociations. J’ai expliqué que ce qui s’écrivait ne figeait rien, et que chacun(e) restait libre de sa propre histoire…

J’ai mis en italique quelques réflexions d’enfants, et quelques remarques et questions de l’enseignante, lors de la première phase.

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Oh, une panthère ! Elle s’est arrêtée, avec sa queue levée, et elle attend. Il y a quelque chose en face d’elle, un danger peut-être ? Elle se prépare a attaquer. Elle a repéré une proie. C’est un félin, et les félins, c’est dangereux.
La panthère n’est pas seule ; Elle va devant, devant le dompteur et la lionne. Le dompteur tient son fouet contre lui. Il a mis son bel habit pour faire un numéro avec les animaux. Tous obéissent : le lion, les lionnes, l’éléphant. C’est la panthère qui commande les animaux ; ils la suivent.
Mais voila le clown blanc. Pleure-t-il ? Sourit-il ? Il avance, maladroit dans ses chaussures trop grandes.

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Ce n’est pas un clown ? C’est quelqu’un, tu sais, ceux qui font semblant de faire des gestes et qui sont tristes. Je ne sais pas comment ça s’appelle, des gens qui imitent des choses et qui ne parlent pas. C’est un mime…”

Je demande à chacun d’écrire d’un mot ou d’une courte phrase ce qu’il pense et/ou fait.
La question de la larme est longuement débattue : vraie ou fausse.
Pourquoi passe -t-il au milieu de la piste ? Il ne devrait pas être là. C’est le numéro de l’écuyère. Il traverse la piste. Il pourrait la faire tomber. Pourquoi le dompteur est-il encore là ? Pourquoi n’est-il pas parti avec les animaux ? 
C’est le numéro de l’acrobatiste… 
Les voilà face à face, clown et cheval. L’écuyère se prépare à faire un salto arrière. Le cheval est surpris. Il est beau, tout gris avec des tâches blanches.
Et le clown applaudit, pour dire “c’est bien ton numéro.” Il est tellement heureux. Sa larme, c’est pour pleurer de joie. Et son sourire est grand, comme un quartier de lune.
Il veut faire pareil que l’écuyère, alors il monte sur un autre cheval. Comme il n’est pas très doué, il n’y arrive pas. Le cheval est trop grand pour lui, et puis , il n’a pas appris ! Le cheval s’énerve de l’avoir sur son dos, les fesses en l’air.

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Son cheval se cabre, et les autres aussi. Ils ont peur. Et lui, il est par terre, tombé dans les habits de l’écuyère qui se sont déchirés. Alors les chevaux s’enfuient.
C’est dangereux : un cheval, ça donne des coups de pied et ça peut te tomber dessus, c’est lourd…
Le dresseur le chasse à grands coups de bottes. Il a tout fait rater. C’est une grosse bêtise. Il a saboté tout le travail du cirque et les gens ne voudront plus revenir. Il voulait être l’écuyer, se faire remarquer par l’écuyère… Au revoir le clown ! C’est une triste histoire…
Échanges autour d’une question importante depuis plusieurs pages… Est-ce que c’était fait exprès dans le spectacle, où pas du tout ?…
Dans la ménagerie, il vient dire au revoir aux animaux. Il est en colère, énervé, triste, et pas content… Il a envie de faire quelque chose de mal…
Il ouvre la cage du lion. C’est dangereux. Il pourrait se faire manger. Et puis, ça va mettre la pagaille !
La question précédente a trouvé sa réponse. Sa venue sur la piste ne faisait pas partie d’un numéro. 
La lune toute ronde brille dans la nuit noire. Une silhouette blanche court sur la colline. _ C’est le clown qui s’enfuit. Il ne veut plus voir personne. Il ne veut pas qu’on le retrouve.
Ça fait penser à Pierrot, de “Au clair de la lune”…
Dans le bois il se retourne. Quelque chose bouge là-bas, sur le chemin. Il se demande ce que c’est. Il n’est pas rassuré…
L’éléphant ! Vite, il s’accroche à une branche, se balance pour grimper dans l’arbre. Les autres animaux sont-ils là ? Est-ce qu’ils le suivent pour le remercier de les avoir délivrés ?
Comme il ne sait pas, il veut se protéger, se mettre à l’abri dans l’arbre.
Ouf ! Il est sur une branche et essaie de grimper plus haut, en se retournant pour surveiller l’éléphant. Avec sa trompe, il peut l’attraper.
Mais… Il les a tous délivrés… C’est parce qu’il aime les animaux et ne veut pas qu’ils soient prisonniers. Et puis comme ils sont dressés, ils sont habitués à suivre les hommes. Ils préfèrent suivre le clown, qui est gentil avec eux, que rester avec le dresseur qui les fouette.
Cris de joie : ils se sont tous échappés, il avait ouvert toutes les cages, c’est bien…. Avec la question “pourquoi l’ont-ils suivi ?”.
Dans la nuit, on ne voit que l’ombre des animaux, et leurs yeux brillants. Mais le clown tombe à la renverse et perd ses chaussures. Les animaux s’avancent. Que vont-ils faire ?
L’attaquer ? Le laisser partir seul ? S’en aller en liberté ? Aller avec lui ? Revenir au cirque avec lui pour chasser le dompteur et faire un cirque comme ils aimeraient ?
Ils regardent le clown qui ramasse ses chaussures. Tout le monde semble calme, personne n’a peur… l’éléphant tend sa trompe pour le saluer, le remercier de les avoir délivrés. Peut-être veut-il l’emmener sur son dos.

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Oh ! Un nouveau spectacle dans la nuit… Le clown jongle avec ses chaussures pour les animaux. Pour eux, il fait un spectacle. Ils sont tous là, comme sur des gradins. Ils sont devenus des spectateurs, éblouis par le jonglage.
J’ouvre la dernière page et je demande aux enfants de la regarder quelques instants, sans aucun commentaire. Le lendemain, je demande à chacun(e) d’écrire “sa” propre fin de l’histoire. Puis il y a lecture collective en classe et choix commun de l’un des textes qui sera le final de l’histoire.
Sur le dos de l’éléphant, le clown jongle encore avec ses chaussures. Ils partent ensemble. Ils retournent vers leur habitat naturel. Le clown va avec les animaux, en Afrique du Sud, dans la savane. Ils veulent vivre tranquille, dans le calme…

 

Isabelle L.

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